La délicate transition syrienne est devenue encore plus incertaine à la suite de bombardements israéliens à Damas, le 16 juillet. Ils constituent, faut-il le rappeler, des violations inacceptables du droit international et de la fragile souveraineté syrienne. L’Etat hébreu a justifié ses opérations en se posant en protecteur de la communauté druze, présente au Liban, sur le plateau syrien du Golan annexé unilatéralement par Israël et en Syrie.
Ces bombardements israéliens, dont la justification constitue un hommage aux colonisateurs du passé prompts à jouer la carte communautaire pour leurs propres intérêts, ont fait suite à des affrontements meurtriers. Ceux-ci opposaient les miliciens de cette communauté à des hommes en armes appartenant à des tribus bédouines, soutenues par des forces du nouveau pouvoir. Les combats se sont déroulés au sud de Damas, notamment à Souweïda, une ville à majorité druze.

Il était inévitable qu’après un demi-siècle de dictature, la chute de la dynastie Al-Assad et l’arrivée d’un nouveau pouvoir issu du djihadisme, le 8 décembre 2024, rouvriraient de vieilles plaies en Syrie. En dépit des discours du nouvel homme fort de Damas, Ahmed Al-Charaa, dans lesquels il assure vouloir associer aux nouvelles institutions qui se mettent en place l’ensemble de la complexe mosaïque confessionnelle syrienne, les vengeances et règlements de comptes se sont succédé depuis plus de six mois. La communauté alaouite, liée, souvent malgré elle, aux horreurs du régime déchu, en a d’ailleurs été la première victime.
« Remodelage » du Moyen-Orient
Instrumentalisés par Israël, les affrontements mettant aux prises Druzes et forces gouvernementales syriennes sont inquiétants. Ils s’ajoutent à une liste déjà longue d’interventions israéliennes en Syrie, engagées dès la fuite de Bachar Al-Assad.
Profitant de la situation, l’Etat hébreu a en effet systématiquement détruit ce qui restait des infrastructures de défense d’un pays en ruine après une décennie de guerre civile. Violant ses propres engagements, il a également pris position dans la zone tampon créée après la conquête du Golan syrien, et entend réduire encore plus l’accès des forces syriennes à leur propre territoire. Israël n’a pas caché non plus son mécontentement après la décision du président des Etats-Unis, Donald Trump, de lever les sanctions américaines qui rendaient impossible une reconstruction de la Syrie.
Un tel comportement nourrit les interrogations à propos du « remodelage » du Moyen-Orient revendiqué par le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, fort d’une hégémonie militaire que les bombardements contre l’Iran, du 13 au 23 juin, ont mis en évidence de manière spectaculaire. Alors que le ministre d’extrême droite Bezalel Smotrich plaide ouvertement pour un « démantèlement » de la Syrie, Benyamin Nétanyahou semble faire le calcul que maintenir dans l’instabilité les pays avec lesquels Israël n’a pas conclu de traité de paix, voire les humilier, est une garantie pour sa sécurité.
Ce pari est particulièrement hasardeux. Pour une région désespérément en quête d’apaisement autant que pour l’Etat hébreu lui-même. On ne peut que regretter, compte tenu des enjeux, que les Etats-Unis se refusent à user efficacement de leur influence sur Benyamin Nétanyahou pour lui signifier les limites à ne pas dépasser.
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